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Critique de « Everytime » par Riffindots

  • Photo du rédacteur: CHARLES
    CHARLES
  • il y a 3 jours
  • 2 min de lecture
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« Everytime » arrive comme un éclair tiré à travers un nuage d’orage, le genre de morceau qui ne frappe pas à la porte mais l’arrache de ses gonds avant de vous entraîner dehors en plein vent. Dès la première pulsation, Riffindots électrise le ciel, chargeant chaque seconde d’un danger à peine contenu. La chanson ne commence pas vraiment : elle s’enflamme, jaillissant dans l’air avec une intensité brute qui semble vibrer sous les doigts. On ne l’écoute pas on s’y accroche. Les guitares surgissent avec un grondement métallique, grattant et crépitant tandis qu’elles taillent leur sillon dans le mix. Elles avancent comme une machine réveillée après des décennies d’hibernation : bruyante, imprévisible, et terriblement exaltante. En dessous, la section rythmique cogne comme un cœur mécanique qui réapprend à battre. C’est heurté, pulsé, urgent, mais il y a une douceur tordue dans la façon dont les éléments s’entrechoquent, comme si chaos et mélodie avaient été soudés ensemble à la main.


Puis viennent les synthés — perçants, distordus, étrangement humains. Ils s’enroulent vers le haut comme des signaux envoyés par un vieux satellite cabossé tentant de reprendre contact avec la Terre. Leurs textures scintillent avec le charme d’un matériel ancien : boutons qui craquent, câbles qui vibrent, témoins lumineux qui clignotent. L’effet est hypnotisant. On a l’impression que le morceau capte une fréquence oubliée, tirant des souvenirs de l’interférence pour les transformer en son. La voix brûle d’une intensité fébrile. L’interprétation est râpeuse mais joueuse, un chant qui serpente à travers le vacarme avec une audace presque imprudente. Les harmonies frappent, plongent et s’entrechoquent, donnant l’impression que plusieurs esprits se disputent la dernière réplique. Il y a une théâtralité débridée comme quelqu’un riant au bord d’une falaise, non par peur, mais par pur vertige. L’émotion surgit d’un bloc : désir, lucidité et une pointe de joie délicieusement détraquée.


En tant que titre final du prochain album Latitude Bera, « Everytime » ressemble à une porte qui se referme brutalement sur un monde patiemment construit puis joyeusement démoli. C’est un final qui ne cherche pas à lisser les contours au contraire, il les fissure encore davantage pour laisser filtrer la lumière. La production, façonnée au Pays basque, donne au morceau une texture balayée par le vent et la mer, comme s’il avait séché sur une corde à linge face à l’Atlantique avant d’être scellé dans sa forme définitive. Riffindots — Britta Pejic — continue de modeler la musique comme une sculptrice préférant les outils irréguliers : l’imagination plutôt que la prévisibilité, l’instinct plutôt que les plans. Son processus créatif, qui relie la Nouvelle-Angleterre au Pays basque, insuffle à son œuvre un battement excentrique, transcontinental. « Everytime » s’impose comme son éclat le plus audacieux : étrange, lumineux, résolument bruyant et impossible à oublier. C’est une fusée de détresse pour celles et ceux qui cherchent une musique qui ne se contente pas de sonner différemment elle se ressent différemment.




écrivain: Charles

 
 
 

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